Dans
un communiqué le gouvernement nord-américain a mis en garde Bachar
al-Assad contre « une autre attaque de masse utilisant des armes
chimiques », au risque que « lui et son armée » payent « le prix fort ».
Encore un épisode qui confirme l’escalade entre la coalition
internationale et Assad et ses alliés en Syrie. Mais quel est l’objectif
derrière ces mots ?
Le communiqué de la Maison Blanche de lundi soir indique que
« les Etats-Unis ont identifié de potentielles préparations en vue d’une
autre attaque à l’arme chimique du régime d’Assad », ce qui
entrainerait une réponse immédiate de Washington. Mais la mise en garde
des Etats-Unis ne s’arrête pas à l’armée d’Assad. Elle s’adresse
également aux principaux alliés de Damas. Ainsi, l’ambassadrice
étatsunienne à l’ONU, Nikki Haley, twittait lundi : « Toute nouvelle
attaque commise sur le peuple syrien sera attribuée à Assad, mais aussi à
la Russie et à l’Iran qui soutiennent le massacre de son propre
peuple ».
La Russie a rapidement réagi à travers le porte-parole du Kremlin,
Dimitri Peskov, estimant « inacceptables » les menaces à l’encontre du
gouvernement syrien. « Nous sommes en total désaccord avec l’expression
‘une autre attaque’ car, comme vous le savez, malgré toutes les demandes
de la part de la Russie, il n’y a pas eu d’enquête internationale
indépendante » sur la dernière attaque à l’arme chimique, début avril,
contre la population de Khan Cheikhoun, a déclaré Peskov.
Effectivement, lors de la dernière attaque chimique contre la
population civile en Syrie, les Etats-Unis ont accusé le gouvernement
syrien d’en être le responsable et ont riposté avec le lancement de 59
missiles contre une base aérienne du régime, d’où serait partie
l’attaque. Cependant, il n’est aucunement démontré qu’Assad soit
vraiment le responsable de cette attaque.
Evidemment, qu’il n’y ait pas de preuves ne veut pas dire que le
régime syrien est incapable de recourir à de tels crimes contre la
population civile. Six ans de guerre civile, avec des bombardements
quotidiens, des villes assiégées, des tortures, entre autres, montrent
bien de quoi est capable le gouvernement de Bachar al-Assad et ses
soutiens. Cependant, aucune confiance ne peut être faite aux
déclarations des puissances impérialistes comme les Etats-Unis qui,
comme tout le monde le sait, ont déjà inventé des « preuves » sur des
armes de destruction massive pour justifier leur invasion en Irak en
2003.
Armes chimiques : l’hypocrisie bat son plein
L’utilisation d’armes chimiques est devenue dans le discours des
dirigeants des puissances occidentales le synonyme du « mal absolu », la
« ligne rouge » à ne pas dépasser. Or, en Syrie, et ailleurs dans les
différents conflits armés dans le monde, l’écrasante majorité des morts
sont provoquées par les « armes conventionnelles ». Des bombes, des
tanks, des munitions puissantes, des avions et hélicoptères de combat
performants, entre tant d’autres « inventions destructrices », dont les
principaux marchands ne sont autres que les puissances occidentales
elles-mêmes, les Etats-Unis et la France en tête.
On ne peut pas oublier qu’au Yémen par exemple c’est avec les armes
occidentales que l’Arabie Saoudite mène une guerre sanglante et sauvage.
On ne peut pas oublier non plus que les alliés nord-américains des
Forces Démocratiques Syriennes (FDS) ont bombardé Raqqa, où entre
100.000 et 150.000 civiles habitent encore, avec du phosphore blanc. Une
munition particulièrement nocive qui provoque des brûlures très
difficiles à éteindre. Une bombe utilisée régulièrement par l’armée
israélienne contre la population de Gaza. D’après l’ONG « Raqqa is Being
Slaughtered Silently » (« Raqqa se fait massacrer en silence »), entre
mars et juin, 600 personnes ont perdu la vie lors de l’offensive pour
reprendre Raqqa à Daesh.
Quel est le sens de cette menace de Washington ?
Pour le moment au moins une chose est claire : les menaces des
Etats-Unis n’ont rien à voir avec l’éventuelle utilisation d’armes
chimiques de la part du régime. En effet, depuis plusieurs semaines on
assiste à une véritable escalade et d’accrochages entre la coalition
internationale et les forces alliés à Assad.
L’incident le plus grave s’est produit récemment quand les Etats-Unis
ont abattu un avion de combat syrien, ce qui a entrainé la rupture de
l’accord de « désescalade » de la part de la Russie et une menace du
Kremlin d’attaquer les avions nord-américains qui se trouveraient à
l’ouest de l’Euphrate. Précédemment, les étatsuniens avaient également
abattu deux drones iraniens et attaqué des positions de l’armée du
régime près de la triple frontière syrienne, irakienne et jordanienne.
En effet, la chute annoncée de Raqqa, capitale des territoires
contrôlés par Daesh, a ouvert une nouvelle phase dans la guerre
syrienne : les forces du régime et ses alliés, aussi bien que la
coalition internationale, cherchent à mettre la main sur les territoires
repris à Daesh, notamment la région de Deir ez-Zor, riche en pétrole et
zone géographique stratégique.
Avec les incidents qui ont eu lieu ces dernières semaines Trump
chercherait à montrer que les Etats-Unis sont prêts à défendre leurs
intérêts en Syrie et à attaquer les positions du gouvernement et ses
alliés s’il le faut. La mise en garde d’Assad n’est que très faiblement
liée à la question de l’utilisation d’armes chimiques, elle cherche
plutôt à exprimer cette prédisposition agressive de la part des Etats
Unis.
Macron et les autres sur la même ligne que les Etats Unis
Les Etas Unis peuvent d’ores et déjà compter sur le soutien du
gouvernement britannique qui a affirmé qu’en cas d’attaque chimique il
serait derrière toute réponse des nord-américains. Mais le gouvernement
français a, à travers Macron, exprimé tout son soutien à la ligne de
Trump également. Lors d’un entretien téléphonique Trump et Macron ont
affirmé la nécessité de lutter ensemble contre le terrorisme.
La semaine dernière, lors d’un entretien à huit journaux européens
sur la politique internationale de la France, Macron avait déjà
affirmé : « l’utilisation d’armes chimiques donnera lieu à des
répliques, y compris de la France seule. La France sera d’ailleurs à cet
égard parfaitement alignée avec les Etats-Unis ». A cela, il faudrait
ajouter le fait que Macron a invité Donald Trump à participer du
traditionnel et réactionnaire défilé militaire du 14 juillet à Paris.
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